LA COUVERTOIRADE, Oui, on peut vivre là toute l'année
C’est La question que l’on me pose à chaque fois. Pour peu que l’on me surprenne, sortant sur mon balcon ou que l’on apprenne que j’habite intra muros dans la cité fortifiée de La Couvertoirade, immanquablement la question fuse : « Mais vous habitez là toute l’année ? » Drôle de question en vérité. Et pourquoi pas ?
Pourquoi ne pas choisir de vivre à l’abri de remparts séculaires. Non pas à l’abri du temps qui passe mais au cœur du temps, ancré dans l’histoire comme l’un des innombrables maillons d’une chaine humaine. Ici, chaque pierre raconte sa mémoire. Ici, les tumultes de l’Histoire s’entremêlent à la beauté paisible d’une contrée préservée. Ici, les murs ne séparent pas, ils rassemblent et semblent nous dire « vous passez et nous demeurons ». J’aime que ma demeure demeurre.
Et puis, la deuxième question arrive en suivant : « Et c’est pas trop dur l’hiver ? » Non, vraiment pas et même au contraire. Nous sommes 23 habitants à vivre là toute l’année. Nous veillons les uns sur les autres. Parfois (souvent) nous trainons un peu lors d’apéritifs mémorables, nous jouons aux cartes, nous devisons, nous échangeons, bref nous vivons et n’attendons pas la fête des voisins pour nous retrouver. Située à un jet de pierre de l’A 75, nous ne sommes pas vraiment éloignés des belles agglomérations. Rien ne nous empêche de passer l’après midi dans la foule de Montpellier, aller à l’opéra, au cinéma, à Ikéa et retrouver ensuite, avec joie, le calme des nuits étoilées du Larzac. Alors, bien sûr, l’été est plus agité. Nombreux sont les visiteurs à déambuler dans les ruelles de la Cité. Mais quand on possède un trésor, il faut savoir le partager. C’est confortable d’avoir le monde qui vient à soi sans bouger un petit orteil. Espagnols, Italiens, Allemands, Russes, Catalans, Hollandais, toutes les nationalités défilent sous mes fenêtres. Et quand la foule devient trop dense, quand le silence me manque un peu, il me suffit de sortir vers le Montaymat, quelques pas en longeant les murets de pierres sèches et là, loin de la rumeur du monde, je savoure la plénitude d’une solitude volontaire.
Alors oui, on peut vivre là toute l’année, et c’est même un avant-gout du paradis.
Solveig LETORT